Rêveries 7 : L’art est un environnement (suite)
L’esprit et la pensée : Le cerveau est un ordinateur où les logiciels (soft) s’adaptent, écrivent eux même des corrections et modifient même l’électronique (hard). L’esprit (le soft et le hard) est indispensable à la pensée (le calcul). J’ai le sentiment que l’esprit est un abri malléable, un paysage sans lequel nos pensées raisonnables ne pourraient s’écouler. La pensée d’un fou est logique mais son esprit est dans la maladie. J’élabore peut être ici, non pas des hypothèses, mais des rencontres accidentelles avec la continuité de ma propre logique, sans doute des aberrations. J’insiste à nouveau, car au milieu de mes tâtonnements, j’ai le sentiment qu’il y a quelque chose. Ce qui rend plausible ma rêverie, c’est la nature de notre cerveau qui peut s’auto-modeler selon une infinités de formes. Ce que je nomme “Art” ici serait une voie de communication naturelle, de choses non-raisonnables qui génèrent les choses raisonnables. Mais comment la “raison” pourrait-elle comprendre avec cette même “raison” ce qui anime cette “raison”. J’imagine qu’au dessus de notre pensée qui elle même se tient au dessus de nos intelligences mécaniques, siège une “configuration culturelle collective” marquée par “le temps et le lieu”; un esprit. Lorsque cette “configuration naturelle” est contrôlée par des loups ou des fous, on peut mieux percevoir la puissance des dictatures, des sectes, des mouvements de foules aux prises avec la peur et la mesquinerie, percevoir les manoeuvres autoritaires : les manipulations, le conditionnement, les propagandes, les “chapes de plomb”, percevoir aussi que toute révolution culturelle rapide est nécessairement un viol. Je continue mon film...
Il me semble qu’une oeuvre, par la singularité de son engagement, propose une certaine orientation du devenir de l’identité humaine et de sa pensée. Le vrai choix, c’est la tribu ou le public qui le fait en intégrant ou non les oeuvres dans leur vie. Contrairement aux dictateurs, aux sectes, et aux révolutionnaires violents, j’imagine notre artisan comme étant porté par un “instinct” inscrit dans sa nature humaine. Une nature humaine collective qui dépasse l’individu artisan, attentif à son ouvrage, à la manière d’une abeille dans sa ruche. Une abeille qui distille dans ses mandibules que sont ses mains, une singulière gelée royale. Un produit aux effets dérisoires, agissant sur une chaîne longue de plusieurs milliers d’années.
“L’artiste résume, il rend claire pour le commun des hommes qui ne voit et ne sent que vaguement en présence de la nature, les sensations que les choses éveillent en nous” (Delacroix)
Mon hypothèse procède du fantasme, car comment prêter de tels pouvoirs aux décorations de nos objets et aux parois de nos cavernes ? Le mot “Art” convient-il ? Car toutes les productions humaines qui constituent notre environnement ne sont pas reconnues indistinctement comme étant de l’art.
Une chose apparaît cependant, la culture “du lieu et du temps”, transpire en chacune de nos productions. Avec plus ou moins de bonheur, le souffle du style est sans appel, ce qui étaye notre probabilité d’un ”tout culturel naturel”.
Faudrait-il rechercher ce qui tient de l’art, non pas dans les productions qui subissent la culture ambiante, mais dans ce qui la devance. L’art serait une pensée capable d’agrandir ou de rafraîchir cette lumière par laquelle nous percevons toutes choses. Mais il est d’usage de considérer qu’au contraire les avancées de l’art sont à l’avantage de la science qui lui sert de guide. Il est également d’usage de considérer les avancées de l’art comme profitables uniquement à l’art lui même, un monde clos ne vivant que pour lui même.
"L’art doit être à lui-même sa propre fin, cherchant à réaliser la beauté pure, sans se préoccuper de morale ou d’utilité” (Théophile Gautier 1835)
— “L’Art n’est pas fait pour rassurer, ni consolider des concepts mourants, mais pour l’Eveil. Il est un moyen, et non une fin..” (Jean Arène)