Rêveries 7 : L’art est un environnement (suite)
“Témoignage” contre “savoir” : Nous observerons un décalage terrible entre un sujet appris et un sujet vécu. Une personne qui a directement éprouvé l’expérience d’une chose est très différente d’une personne qui conçoit par froide logique cette même chose. L’un oubliera vite tandis que l’autre n’oubliera jamais et sa vision des choses pourrait se trouver agrandie ou rétrécie selon la manière dont il accusera le “choc”. Tous deux risquent une défaillance ou un avantage différent. Il est probable que la logique intellectuelle du “connaisseur” ne “colle” pas à la réalité, mais il pourrait en revanche trouver un avantage par son “sang-froid”. Le problème du “connaisseur” (intellectuel ou savant) est qu’une chose logique n’est pas forcément vraie en réalité. Il est capable, par un excès de confiance en lui, d’invraisemblables manques de discernement. La sensibilité de “l’aventurier” (celui qui à éprouvé une expérience) peut l’amener à interrompre l’aventure trop vite par des jugements trop définitifs. Il est dans ce cas d’usage de dire que “l’expérience est l’intelligence des cons”. Cela ne vaut pas pour les “aventuriers” courageux, car le devoir de cet aventurier, son honnêteté, c’est de poursuivre sans cesse l’aventure. Celui qui éprouve l’expérience des choses, creuse en lui son sens de la profondeur et agrandit au dehors de lui son sens de la perspective. Son épreuve peut lui apporter un éclairage par lequel il peut découvrir par lui même de nouvelles choses, qui ne lui ont pas été enseignées.
Par exemple votre regard changera sur une maladie si un jour elle touche un proche ou vous même. Il se pourrait aussi que par empathie, vous compreniez mieux tous ceux qui sont affectés, même si leur vécu est éloigné du vôtre. Votre imagination et votre pouvoir d’anticiper sur ce qui pourrait faire besoin, pourrait se trouver affinés et vos propos se trouver plus adéquats. Il est d’usage de dire que “les cons n’ont jamais connu la misère”. Pour résumer encore, il y a des choses que l’ont reconnait ou que l’on conçoit. Ce que je crois reconnaitre et comprendre au sujet de l’art, est ce témoignage direct de choses qui s’éprouvent et qui ne sont pas “sensiblerie” mais qui sont “vécu”.
Pascal, en introduction du condensé postume de ses écrits “Les pensées” de Pascal, décrit deux formes d’ésprit qui lui semble les plus caractéristique : l’ésprit mathématique et l’ésprit intuitif.
L’esprit fait la forme : L’âme génère les formes, ou les formes génèrent l’âme ?... Est-ce légitime de concevoir que c’est l’esprit qui fait l’apparence ? Forme et fond, le propos dominant veut que ces deux là ne sont jamais séparables... Cette confrontation est passionnante, et vous m’excuserez j’espère. Permettez moi d’aller jusqu’au bout de mon introspection.
“... en un mot c’est ce que l’âme a ajouté aux couleurs et aux lignes pour aller à l’âme” (Delacroix).
Il existe des amas de formes transportant seulement du vide. Le dit “fond” peut se trouver démuni de consistance. C’est que l’apparence est une empreinte de l’esprit qui l’engendre. D'ailleurs l’unité découle de la persistance d’un même esprit. “Fond” égale “forme” ne veut pas dire que l’habit fait le moine ! C’est le cas de l’auberge espagnole, où, par hasard, des formes accompagnent un état d’esprit qui croit s’y reconnaître. Or, même à notre insu, par le biais d’un caractère, l’âme ou la pensée impriment la matière visuelle. À la façon du microsillon, la lecture d’une forme retranscrit la nature de l’esprit qui a organisé cet événement visuel. J’aimerais pourtant pouvoir affirmer que sans cela l’art n’existerait pas.
“Tout est beau pour l’artiste, car en tout être et en toute chose, son regard pénétrant découvre le caractère, c’est à dire la vérité intérieure qui transparaît sous la forme, et cette vérité, c’est la beauté même” (Rodin).
Vous n’êtes pas obligé de me suivre, car me direz-vous, l’âme du spectateur n’est jamais “à l’arrivée” conforme à l’âme de “l’émetteur”. Il est généralement d’usage de dire que le peintre fait 50 % du chemin et que l’amateur fait l’autre moitié. D’accord, mais dans cette communication, il n’y à rien à comprendre, rien qui oblige le spectateur à se soumettre à une pensée comme pour une leçon, un ordre ou un “message”, message qu’à tort l’on tient à suspecter dans une oeuvre. Il était ici supposé qu’il ne s’agissait pas d’informations raisonnables, mais de choses non-raisonnables, en amont de ce qui s’analyse : une forme d’esprit (mais comment donc nommer cette chose bizarre !?).
En vue de l’arbitraire de mes propos, je vous remercie de continué malgré tout et d’accepter de jouer le jeu...